Sa face secrète...

Hizelaya est retournée voir Pablo Hermoso de Mendosa aux arènes de Dax en août dernier. Comme un 6e sens développé tout au long de ses combats, l’artiste capte les moindres ondes d’énergie, les particules d’émotion...
 

Ce jour-là dans les Landes, les nuages sont bas et lourds ; le taureau est belliqueux. Pablo Hermoso de Mendosa doute, s’interroge. «Une angoisse nous serre le ventre. J’ai capté cette tension qui m’a insufflé ce nouveau travail sur la face cachée de mon rejoneo».
 

De cette émotion suprasensorielle, Hizelaya crée un triptyque plus abstrait où le cheval carapaçonné devient un invincible cheval d’arçon et protège le rejoneo.


L’artiste a choisi de travailler avec les mêmes éléments : le sable, le couteau et des couleurs pop vives comme un talisman qui symbolise son surcroît d’énergie qu’elle souhaite transmettre au spectateur.
 

Quelques mois plus tard naissent six collages travaillés à partir de muletas et de vêtements portés par l’artiste dans son atelier. Ce mélange des textiles, la muleta et le sang et les vêtements couverts de peinture d’Hizelaya sont telle une cérémonie de frères de sang « lorsqu’enfant, on mélange nos gouttes de sang pour prouver son engagement ». Dans la série de portraits, l’artiste a souhaité mettre en avant le côté humoristique du rejoneo. « J’ai voulu casser cette arrogance dans la barbarie ». L’habit de lumière est revisité, imprégné par l’artiste. Le fond est parfois vierge comme une fenêtre de dialogue avec le spectateur; parfois on distingue le cheval, volontairement en retrait, dessiné à la gouache afin de souligner sa fragilité.
 

Le fil conducteur de « Pop Culture 2 » se trouve dans l’ambivalence des sentiments, le dédoublement de personnalité du rejoneo. De la maîtrise victorieuse dans Pop Culture 1, Pablo Hermoso de Mendosa est passé au doute, au questionnement, à l’ironie. « Durant la création de ces oeuvres, j’ai écouté en boucle les chansons de Gainsbourg. Cette double facette de Gainsbourg/ Gainsbar colle parfaitement à mon rejoneo. J’avais envie de dévoiler cette face secrète que j’ai décelée à Dax ».
 

A l’occasion de l’exposition à la galerie Eraunsia, Hizelaya présente également des toiles originales de la série « Mon pays ». Ses sujets sont d’inspiration traditionnelle basque. La place d’Ascain, une ruelle à Ciboure, un lavoir, Fontarrabie... « Je me suis inspirée du travail de Matisse. Il avait l’habitude d’effacer ses toiles jusqu’à trouver la parfaite harmonie. Il demandait à son assistante, chaque soir, de photographier son tableau avant de tout recommencer à zéro, sur une toile vierge. J’ai trouvé cet exercice extrêmement stimulant bien que très différent de ma façon de peindre. La peinture est comme une urgence ; je travaille de façon instinctive, impulsive. Mais avec ces toiles Mon pays, j’ai voulu rendre hommage à Matisse ».  

Ludivine Charniguet  -
La Semaine du Pays Basque du 30 juillet au 5 août 2010